Stéphane VHD Affaire Conclue
Stéphane VHD d'affaire conclue
Salut les chineurs !
Bienvenue dans notre rubrique Paroles de Broc, préparez-vous à une plongée captivante dans l’univers fascinant de la brocante et des objets vintage !
Aujourd’hui,est un grand jour, j’ai le plaisir d’interviewer Stéphane Vanhandenhoven , un professionel passionné qui va partager ses secrets de brocante, ses anecdotes incroyables et ses précieux conseils.
Bonjour Stéphane, tu es apparu aux yeux du grand public avec l’émission Affaire conclue diffusée sur France 2.
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Tu affiches 40 années de passion et de chine au service de l'art et de la brocante, raconte-nous ton histoire. Comment es-tu tombé amoureux de ce métier et de la brocante ?
Tous les métiers exercés avec passion remontent à la plus tendre enfance. Après des rencontres viendront affiner ce début de passion. La chance doit aussi être au rendez- vous pour permettre de transformer cette passion en métier.
Des origines modestes et un refuge dans les greniers
Enfant, issu d’une famille modeste dont je reste fier, les rapports avec mon père étaient assez difficile.Je trouvais souvent refuge dans les greniers de mes grands-parents et oncles. Dès l’âge de 5 ans, je m’émerveillais devant des objets colorés, je feuilletais des magazines oubliés, chérissais des ours en peluche et m’appropriais les outils de mon grand-père, ancien cordonnier. La poussière devenait mon indicateur de trésors cachés.
La frustration comme moteur de passion
Très souvent, l’esprit d’un collectionneur ou d’un marchand naît d’une frustration. Cette frustration se manifeste par le désir de collectionner ce qui nous a manqué enfant. C’est mon cas, et j’en ai fait mon métier.
Un défi paternel et une nouvelle voie
Vers 18 ans, mon père s’est opposé à mon rêve de théâtre, me prédisant un avenir de troubadour. Son défi pour me laisser faire du théâtre ? Réussir l’entrée à L’INSAS, une grande école de théâtre bruxelloise. Je l’ai relevé haut la main, mais il n’a pas tenu parole.
De troubadour manqué à brocanteur passionné
J’ai quitté la maison familiale, direction Bruxelles, abandonné le théâtre ne pouvant me payer les cours et commencé divers petits boulots. Le hasard m’a ensuite conduit vers des brocanteurs qui sont devenus des amis. J’ai découvert un métier ingrat mais exigeant : indépendance, courage et abnégation pour déballer, souvent dans le froid, des objets de faible valeur.
De maison en maison, à la découverte du métier
Encouragé par mes amis, j’ai débuté par du porte-à-porte, bagout aiguisé, j’ai proposé mes services pour débarrasser les maisons. Une époque révolue aujourd’hui.
L’apprentissage : lectures, salles de vente et première boutique
J’ai dévoré la Gazette de l’hôtel Drouot, rêvant devant des objets inaccessibles. Les salles de vente m’ont confronté à la réalité du marché. Après quatre hivers à déballer le même niveau de marchandises, j’ai ouvert ma première boutique.
D’ouvertures en fermetures, vers l’épanouissement
Toujours en quête d’évolution, j’ai déménagé plusieurs fois pour trouver des emplacements plus valorisants. Aujourd’hui, je suis heureux dans ma cinquième et unique boutique au cœur de Bruxelles.
Tu cumules à la fois les tournages pour France 2, ton métier de marchand, tu participes également à de nombreuses manifestations caritatives. Comment trouves tu le temps et l'énergie pour tout faire?
Deux bonheurs immenses et une passion dévorante :
Ma vie à été ponctuée de deux bonheurs immenses. D’abord, la chance d’avoir eu des enfants et de m’être occupé d’eux. Maintenant qu’ils sont grands, je peux consacrer davantage de temps à mon métier, une véritable passion.
Avec le temps et l’acharnement, le succès est venu. Mon magasin s’est agrandi, j’ai embauché du personnel et je travaille d’arrache-pied pour honorer les factures chaque mois. C’est le côté moins glamour du métier, mais une réalité incontournable.
L’énergie qui me guide est double. D’abord, l’excitation à trouver l’objet. Ensuite, le plaisir de la vente, de partager ma passion avec les clients et de voir leurs yeux s’illuminer.
Cette énergie est intrinsèque. Comme disait mon grand-père, « quand je me lève le matin, je vois le soleil et je suis heureux. » C’est cet état d’esprit qui m’anime chaque jour, le moteur qui alimente ma passion et donne un sens à mon existence.
As-tu une spécialité ? Si oui, quelle est-elle et pourquoi te fascine-t-elle ?
Si l’on me demandait de définir ma spécialité, je répondrais avec ironie : le bénéfice !
Plus sérieusement, j’ai débuté mon activité comme brocanteur généraliste en vidant des maisons entières. Mais mon goût pour les meubles de métiers s’est vite imposé, grâce à l’influence de mon grand-père cordonnier.
J’ai acquis des aménagements d’officines de pharmacies et des bistrots entiers pour les revendre à des restaurateurs et des commerçants désireux d’aménager des espaces uniques et authentiques. Cela nécessitait un important espace de stockage, des moyens financiers conséquents et un dos solide, car ces meubles sont souvent très lourds.
Ma véritable spécialité, ce sont les meubles de métiers. Je les aime par-dessus tout, ces meubles sont polis par le travail. Une table de coupe usée par les gestes d’une couturière, le zinc d’un comptoir de bar poli par le temps, un meuble de bijoutier marqué par les outils… La patine, c’est le travail et la sueur et pas la cire teintante. Ces meubles ont une âme, une histoire que j’aime à raconter et à partager.
Dans les années 90, la mode de ce type de mobilier était passée. Je les louais davantage pour des tournages de films que je ne les vendais.
Aujourd’hui, je travaille avec mon fils qui a apporté sa touche à l’entreprise, en nous orientant vers le design des années 50 à 80, italien et américain. Un Américain déménage en moyenne 22 fois dans sa vie, ce qui implique que ses meubles sont conçus pour être déplacés et vivre. C’est ce qui m’intéresse dans un meuble : son vécu, son histoire.
J’ai toujours une nostalgie pour les meubles de métiers, mais les clients d’aujourd’hui s’intéressent davantage à la signature du designer qu’à l’histoire du meuble. Choisir un meuble uniquement comme investissement financier peut être risqué, car les modes passent et la valeur peut fluctuer. Ce qui vaut beaucoup d’argent aujourd’hui peut valoir moins demain. Le contraire est vrai également.
J’arrive aujourd’hui à vendre des objets considérés comme anciens alors qu’ils n’existaient pas quand j’ai commencé mon métier.
Partage tes meilleurs plans et astuces pour dénicher des trésors cachés lors de tes explorations.
Plutôt que de parler de ce qu’il faut faire, je préfère aborder ce qu’il ne faut pas faire.
1. Dénigrer la marchandise : une attitude contre-productive
Personnellement, je ne supporte pas le fait de dénigrer la marchandise dans le seul but de la payer moins cher. Discuter un prix implique d’être respectueux de l’objet et du marchand. N’oublions pas que ce dernier est aussi là pour gagner sa vie. Si l’objet ne convient pas, ne l’achète pas.
Mieux vaut adopter une attitude positive et constructive. Exprimez votre intérêt pour l’objet et engagez le dialogue. Des phrases comme « C’est trop cher pour moi » ou « Ça les vaut peut-être, mais je ne mettrais pas autant » peuvent ouvrir la voie à une négociation courtoise.
Ne jamais oublier les règles de base de la courtoisie. Un simple bonjour peut faire toute la différence.
2. Se méfier des histoires rocambolesques
L’objet a-t-il vraiment été trouvé dans un château ? Il est important de garder un esprit critique face aux récits des marchands. Ne pas se laisser influencer par des anecdotes exagérées.
Apprenez à discerner les réponses types et à les ignorer. Fiez-vous à votre instinct et à votre connaissance du marché.
3. Déjouer les idées reçues
L’avenir n’appartient pas nécessairement à ceux qui se lèvent tôt. J’ai souvent fait de belles affaires en fin de matinée, lorsque les chineurs les plus matinaux sont déjà repartis.J’ai pour devise: Paye un peu plus cher quand il fait clair et un peu moins quand il fait noir.
Ne vous fiez pas aux apparences. Une petite brocante peut receler des trésors cachés, tandis qu’une grande foire peut être décevante.
Fidélisez-vous aux lieux et aux gens qui vous inspirent. Tissez des liens avec les marchands et les autres chineurs. Votre capital sympathie sera votre meilleur atout.
N’hésitez pas à explorer de nouveaux horizons. Sortez de votre zone de confort et visitez des brocantes dans d’autres villes et régions. La France, l’Italie et la Belgique regorgent de trésors à découvrir.
Ne vous privez pas de franchir les portes des « gros » marchands. Ils achètent des meubles en grande quantité et ce qui ne les intéresse pas peut faire votre bonheur. N’hésitez pas non plus à leur demander conseil.
4. Développer un regard aiguisé
Au-delà de vos goûts personnels, apprenez à identifier les objets qui ont du potentiel. Ne vous limitez pas à vos préférences et soyez ouvert à de nouvelles opportunités.
Acheter pour revendre est une stratégie judicieuse. Observez les tendances du marché et investissez dans des objets qui ont une forte demande.
On rêve tous de trouver le Graal ! Raconte-nous l'histoire de ta trouvaille la plus incroyable et l'émotion qu'elle a suscitée en toi.
Incroyable : une question de perspective
En tant que marchand, « incroyable » se traduit par une marge exceptionnelle. Pour moi, cela signifie un objet d’une beauté extraordinaire, et si l’on y ajoute un profit substantiel, c’est le summum du bonheur.
L’émotion suscitée par l’objet est tout aussi importante. Il m’est arrivé de pleurer deux fois sur le plateau d’Affaire Conclue lors de l’achat d’objets.
La première fois, c’était face à une dame bruxelloise qui vendait un tableau de la place Sainte-Catherine à Bruxelles peint par Lucien Franck, un grand artiste post-impressionniste belge. J’ai d’abord pleuré de stress à l’idée de rater l’objet, puis de joie après l’avoir acquis.
La deuxième fois, c’était en 2019, lors de l’achat dans l’émission Affaire conclue d’une coupe en bronze signée par Jean Marais et numérotée 3/8. Cette coupe était formée par les deux mains de Jean Cocteau et les deux mains de Jean Marais. C’était une pièce imposante, lourde et surtout, elle représentait Jean Marais, un acteur qui a bercé mon enfance avec ses films de cape et d’épée. Jean Marais et Jean Cocteau étaient amants à une époque où il ne fallait pas l’avouer. Cet objet était une explosion d’amour et rendait leur relation sublime.
Quels conseils donnerais-tu à un (e) novice qui souhaite se lancer dans le monde fascinant de la brocante ?
C’est une question que l’on me pose souvent, pour répondre simplement, je donnerais 3 conseils
1. Définir votre capital de départ.
Il est nécessaire d’investir pour commencer ce métier. Cela ne signifie pas nécessairement beaucoup d’argent, mais un capital défini. Vous pouvez commencer avec 500€ si vous fréquentez les brocantes et vendez en ligne, 1000€ vous offrira plus de confort, 5000€ encore plus, et 20 000€ vous permettront de voir grand.
Je pense qu’il est préférable de démarrer petit. 2000€ à 3000€ peuvent suffire. Le plus important est de travailler avec un système d’enveloppe. Cela signifie que vous devez toujours garder votre capital de départ intact. Remettez dans l’enveloppe la somme consacrée à l’achat et même un peu plus pour augmenter votre capital.
Ne confondez jamais prix d’achat, prix de vente et bénéfice. La marge logique considérée par les impôts est d’au moins X 2. La comptabilité est essentielle dans ce métier et peut faire la différence entre la réussite et l’échec.
2. Acheter intelligemment.
Faites attention à ce que vous achetez. Ne vous laissez pas refiler du neuf ou de la copie. Gardez l’esprit éveillé et logique, et ayez des connaissances de base en matière d’antiquités.
Un objet ancien doit revêtir une certaine qualité. En prenant l’objet en main, vous devez savoir s’il est bon ou pas.
Pour ma part, je n’ai pas le goût du jeu. Je ne parie pas sur un objet que je ne connais pas en me disant « on verra ».
3. Ne pas rester isolé.
Communiquez avec d’autres marchands. Cela vous permettra de partager vos connaissances, vos expériences et vos conseils.
Selon toi, quelles sont les tendances actuelles du marché de l’art et de la brocante ?
Il faut garder à l’esprit que les tendances sont toujours dictées par le marché.
A mes débuts, la tendance était au style Louis-Philippe. Mais pourquoi ce style est-il passé de mode ? Tout simplement parce qu’on n’en trouvait plus et qu’il a fallu se tourner vers autre chose. Ces meubles reviennent actuellement sur le marché, mais leur prix reste relativement bas.
Ce sont avant tout le marché et les marchands qui régissent les prix. Tout le monde consulte les prix sur internet, mais qui publie sur internet ? Les marchands, bien sûr. Ensuite, les clients confirment ces prix par leurs achats.
Quelles sont les tendances actuelles ?
- Le mobilier des années 50 de qualité se raréfie, et le style des années 70 s’essouffle. La tendance se tourne donc vers les années 80, tout simplement parce qu’il ne reste plus grand chose des autres époques.
- L’usuel a le vent en poupe. Les gens recherchent des tables et des chaises de qualité, mais moins de tableaux.
- Le superflu aura tendance à s’effacer. Un vase sera toujours plus utile qu’un chandelier du XIXème siècle
Quelles sont les erreurs les plus courantes à éviter lors de la restauration d'un meuble ancien ?
Éviter les meubles trop à restaurer.
La restauration a un coût. Les restaurateurs comptent leurs heures, les produits et le transport. Il est donc important de ne pas acheter des meubles qui nécessitent une restauration trop importante.
Ne pas camoufler les défauts.
Restaurer un meuble ne signifie pas le transformer en un meuble neuf. Il s’agit de remplacer les éléments défectueux par des éléments sains, sans pour autant dénaturer l’objet. La teinture ne doit pas servir à camoufler les défauts, mais à mettre en valeur le bois.
Être transparent avec le client.
Il est important de signaler au client qu’un meuble ou une céramique à été restauré. Cela permet d’établir une relation de confiance et d’éviter les surprises.
Respecter le travail du restaurateur.
Le travail du restaurateur a un coût. Il est important de ne pas discuter son prix et de le laisser faire son travail en toute confiance.
Présente-nous un objet de ta collection qui te tient particulièrement à cœur.
L’objet qui me tient particulièrement à cœur est un baromètre Napoléon III. composé d’une terrasse rocaille en laiton et bronze, surmontée d’un baromètre rond posé sur un éléphant . Un objet un peu naïf, mais qui me fascine depuis toujours.
Je ne peux en dire davantage pour le moment, car je consacre un chapitre complet à cet objet dans un livre qui sortira le 25 septembre.
Je l’ai reçu en cadeau dans des circonstances difficiles, dans le cadre de mon métier . Il est toujours chez moi depuis 35 ans, et je ne m’en séparerai jamais. C’est un objet qui est chargé d’une vraie histoire, et qui a une grande valeur sentimentale pour moi.
Stéphane, un immense merci pour ton partage et ton enthousiasme !
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Vous pouvez retrouver Stéphane dans l’émission Affaire Conclue sur France 2, dans sa boutique ainsi que sur Instagram
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